Quelles sont les règles de conversion de l'usufruit du conjoint survivant ?
Au décès d’une personne mariée, son conjoint recueille l’usufruit sur toute la succession. La nue-propriété est quant à elle recueillie par ses enfants. Il se créé donc un démembrement de la propriété sur les biens faisant partie de la succession du défunt. Une telle situation peut dans certains cas s’avérer problématique et des tensions peuvent apparaitre entre l’usufruitier et les nus-propriétaires. Pour remédier à ces difficultés, le législateur a prévu la possibilité de convertir l’usufruit du conjoint survivant. De cette manière, l’usufruit cesse et est converti en des droits en pleine propriété.
Qui peut demander la conversion de l'usufruit ?
La conversion peut être sollicitée tant par le conjoint survivant (usufruitier) que par les enfants du de cujus (nus-propriétaires). A défaut d’accord, c’est le juge qui appréciera s’il convient d’accorder ou non la conversion.
Il est admis que le prémourant peut limiter le droit de demander la conversion. Par testament, ce dernier pourrait ainsi interdire au conjoint survivant et/ou à ses enfants de solliciter la conversion. Cette interdiction pourrait porter sur tous les biens démembrés ou une partie d’entre eux (à l’exception des biens préférentiels). Il existe une exception importante. En présence du conjoint survivant, les enfants d’une précédente union du prémourant ne peuvent être privés par celui-ci du droit de demander la conversion.
La loi du 31 juillet 2017 a introduit un régime particulier dans le cadre des familles recomposées. Ce régime s’applique à toute succession ouverte à partir du 1er septembre 2018. Dans un certain délai, tant les enfants du de cujus que leur beau-parent survivant peuvent exiger la conversion de l’usufruit. Contrairement au régime général, le juge ne dispose ici d’aucun pouvoir d’appréciation. Il s’agit d’un « droit absolu » à la conversion dans le chef du beau-parent survivant et dans celui des enfants non communs.
Pour les biens préférentiels, le conjoint survivant dispose d’un droit de veto. Cela signifie que son accord est toujours requis lorsque la demande de conversion porte sur le logement principal de la famille et les meubles qui le garnissent. Même en présence d’enfants non communs, le conjoint survivant peut toujours s’opposer à la conversion de l’usufruit qui grèvent ces biens préférentiels.
Comment convertir l’usufruit ?
Il existe différents méthodes pour convertir l’usufruit du conjoint survivant. La conversion en une somme d’argent est la plus répandue. Dans ce cas, l’usufruit du conjoint survivant est converti en capital, lequel est payable par les nus-propriétaires. Les biens démembrés peuvent également être vendus. Dans ce cas, l’usufruitier percevra également une somme d’argent. Le conjoint survivant peut également racheter la nue-propriété et ainsi devenir plein propriétaire des biens démembrés. Une autre méthode consiste à convertir l’usufruit en une rente indexée et garantie.
Il est également admis que le prémourant puisse aménager les modalités de conversion de l’usufruit. Il pourrait ainsi prévoir par testament que tel bien démembré devra être converti selon telle méthode.
Une nouvelle fois, la loi du 31 juillet 2017 a prévu un régime particulier pour les familles recomposées. Sauf si les nus-propriétaires et le conjoint survivant en disposent autrement, l’usufruit doit être converti en une part indivise de la succession en pleine propriété. A défaut, cette méthode de conversion est donc obligatoire. Cette part est déterminée sur la base des tables légales de conversion, et de l’âge de l’usufruitier à la date de la demande. Toutefois, lorsqu’en raison de l’état de santé de l’usufruitier, sa durée de vie probable est manifestement inférieure à celle des tables légales, le juge peut, sur la demande d’un nu-propriétaire ou du conjoint survivant, écarter les tables de conversion et fixer d’autres conditions de conversion.
Comment valoriser l’usufruit à convertir ?
Dans cette matière, l’autonomie des parties prévaut. Pour valoriser l’usufruit, celles-ci s’appuieront sur la valeur du bien démembré, son revenu, ses dettes, le sexe de l’usufruitier ainsi que son âge et son espérance de vie. Pour s’aider, les parties pourront également recourir aux tables élaborées par des praticiens (tables Ledoux, par exemple). Ces tables permettent de valoriser forfaitairement la valeur de l’usufruit.
En cas d’absence d’accord des parties, ces dernières pourront soumettre leur demande au juge. Ce dernier devra alors obligatoirement appliquer les deux tables de conversion établies chaque année par le ministre de la Justice. L’une pour les hommes et l’autre pour les femmes. Lorsqu’en raison de l’état de santé de l’usufruitier, sa durée de vie probable est manifestement inférieure à celle des tables légales, le juge peut écarter les tables légales et fixer d’autres conditions de conversion. Il pourrait également refuser la conversion.